Ma Première Journée Au Marché
Timothy Kabare
Catherine Groenewald

J'habite le village de Kakuma, un endroit très sec et très chaud, plein d'arbres épineux, et où les chèvres sont plus nombreuses que les habitants. Même le marché est calme, avec seulement quelques petits étalages. Ici, la plupart des gens se déplacent à bicyclette.

1

Un matin, ma mère m'appela et me dit: "Etabo, aujourd'hui, tu as six ans. Nous avons un cadeau pour toi." "Qu'est-ce que c'est? Qu'est-ce que c'est?" ai-je demandé avec impatience. "Demain, nous allons en bus au marché d'Eldoret, répondit-elle, et nous t'emmenons avec nous!" Ma première visite à la ville! J'étais tellement excité que, cette nuit-là, j'ai eu du mal à dormir.

2

Le lendemain, à l'arrêt de bus de Kakuma, je me tenais entre ma mère et ma tante, habillé d'un jean neuf et d'un T-shirt rouge. Je me sentais tout petit entre ma mère si élancée et ma tante si ronde.

3

Le bus était tellement plein que je dus m'asseoir sur les genoux de ma mère. Fatigué par la chaleur et l'excitation, je dormis pendant tout le trajet et ne vis rien du paysage.

4

Le soleil se levait lorsque nous arrivâmes au marché d'Eldoret. À l'entrée, une femme vendait du grain. Dans un coin, deux hommes préparaient leur étalage de patates douces. Un peu plus loin, une petite femme portait un hélicoptère bleu brillant. "Maman, maman, regarde cet hélicoptère!" Mais ma mère me poussa plus loin.

5

Au milieu du marché, se trouvait un vaste étal où étaient vendus des fruits de toutes sortes. Je n'avais encore jamais vu certains d'entre eux. "Comment s'appellent ces fruits?" ai-je demandé à ma mère. Elle me répondit: "Ceux-ci sont les oranges, et ceux-là les goyaves." Je me suis retourné en demandant: "Et ceux-là?"

6

De tous les fruits à l'étal, mes préférés étaient les pommes. J'aimais leur forme et leur couleur. Je me demandais quel était leur goût. Je me suis tourné vers ma mère et lui ai demandé: "Pourrais-tu m'en acheter une?"

7

Dès qu'elle me tendit la pomme, je la lui pris, la saisis à deux mains, et croquai la chair juteuse. Je n'avais jamais savouré un fruit autant que cette pomme. Tout ce que je voulais, c'était ma pomme.

8

Quand la pomme fut finie, je levai les yeux pour parler à ma mère. Mais elle n'était plus là! Je regardai d'où nous étions venus, mais ni ma mère ni ma tante n'étaient là. Je cherchai à droite, puis à gauche. Mais je ne les vis nulle part. "Avez-vous vu ma mère?" demandai-je aux femmes qui vendaient des pommes de terre. Elles ne savaient pas. Je commençai alors à pleurer.

9

Un peu plus tard, une femme me prit par la main et me conduisit à un endroit où il y avait d'autres enfants. Un homme de grande taille, portant une barbe épaisse, me demanda "Quel est ton nom, mon garçon?" "E-ta-bo" répondis-je à travers mes larmes.

10

Je me demandais si les enfants étaient également vendus au marché. J'arrêtai de pleurer et regardai autour de moi pour voir si quelqu'un achetait les enfants dans la salle. Bientôt une femme vint et emmena l'un d'entre eux. "Je serai le prochain à être enlevé, pensais-je, et puis, je ne rentrerai plus jamais à la maison!" Je recommençai à pleurer.

11

Lorsque j'entendis le grand homme à la barbe épaisse demander: "Où est Etabo?" je me mis à pleurer encore plus fort. "Mais je ne veux pas aller avec vous!" ai-je sangloté. Et je courus loin de lui.

12

Lorsque ma mère et ma tante entendirent mon nom, elles se précipitèrent vers la salle. "Etabo, Etabo!" appela une voix familière. C'était ma mère.

13

Comme je me levais pour embrasser ma mère, ma tante dit: "Etabo, nous étions à ta recherche pour t'offrir ton cadeau d'anniversaire." Et d'un gros sac, elle sortit un hélicoptère bleu brillant. "C'est pour toi!" dit-elle.

14
You are free to download, copy, translate or adapt this story and use the illustrations as long as you attribute in the following way:
Ma Première Journée Au Marché
Author - Timothy Kabare, Ursula Nafula
Translation - Nathalie Hecker, Translators without Borders
Illustration - Catherine Groenewald
Language - French
Level - Longer paragraphs